"L'affaire"
du maillot de bain de Reims a agité les réseaux sociaux ce week-end. Le
parquet a fait savoir qu'il n'y avait aucune origine morale ou
religieuse à l'altercation. Pour Jacqueline Costa-Lascoux, directrice de
recherche du CNRS et membre de l'Observatoire rhônalpin de la laïcité,
il est néanmoins naïf de ne pas vouloir voir qu'il y a aujourd'hui en
France "l’émergence d’une police des mœurs qui vise principalement les
jeunes femmes sur le thème de la pudeur".
Jacqueline Costa-Lascoux : Réserve faite des résultats de l’enquête dans ce cas précis, on observe l’émergence d’une police des mœurs qui vise principalement les jeunes femmes sur le thème de la pudeur. « Cachez ce sein que je ne saurais voir », les Tartuffe affirment leur présence ! Des incidents ont éclaté la semaine dernière à la piscine Mermoz à Lyon et dans plusieurs piscines du Grand Lyon où des filles en maillot de bain ont été agressées. Des garçons voulaient les faire sortir de l’eau et ils ont proféré des injures racistes contre les vigiles qui intervenaient. Ces jeunes gens portaient eux-mêmes des bermudas recouvrant un caleçon (pour cacher une virilité prête à s’exprimer car « une femme non couverte excite les hommes » disent-ils, reprenant pour ainsi dire les termes des mollahs du film du réalisateur Mehran Tamadon, Iranien). Des réseaux sociaux leur conseillent aussi le refus du bonnet de bain (« Ça fait kippa »). L’obscurantisme est décidément insondable !
Ce sont évidemment les femmes, qui sont les premières visées. Tous les intégrismes s’en mêlent. Qu’elles soient en « civil », vêtues d’une abaya (uniforme des filles de Boko haram) ou d’un niquab, elles sont surveillées : « Dès que je sors dans mon quartier, je me couvre pour ne pas être embêtée et traitée de… Montrer son corps, c’est blasphémer », me confiait récemment une mère d'élève.