NDLR : "Pour répéter, pour imiter, pour se fier, il suffit de se laisser aller ; c'est la critique qui exige un effort." Henri Bergson
A lire l'excellent article du Point.fr : L'avocat Emmanuel Pierrat s'alarme des coups portés en France à la liberté d'expression..., notamment à l'occasion d'indignations collectives. Entretien.Le Point.fr : Combien de textes limitent, en France, la liberté d'expression ?
Emmanuel Pierrat : Rappelons, d'abord, que ce principe figure dans la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, qui a valeur constitutionnelle. L'article 11 dispose que "la libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement"... Mais une restriction est immédiatement apportée à ce principe, après une virgule : "Sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi." Les États-Unis, eux, n'ont jamais ajouté de virgule à leur "freedom of speech" garanti par le premier amendement de la Constitution. Jusqu'au Patriot Act de l'après 11-Septembre, ils réussissaient à maintenir une liberté d'expression quasi absolue, y compris avec des délirants : les porteurs de croix gammées, le Ku Klux Klan, etc. La Convention européenne des droits de l'homme reprend la liberté d'expression, mais y met elle aussi des bémols. En France, je compte, moi, quelque 400 textes qui y ont porté atteinte.
Par exemple ?
Prenez la loi Guigou sur la présomption d'innocence (qui, au passage, est appliquée dans le sens d'une présomption de culpabilité par les journaux : on parle de "tueur présumé"). Elle date de 2000, après qu'un moniteur de ski, accusé d'avoir entraîné ses clients dans une zone d'avalanche, est montré par le JT de 20 heures menottes aux poignets et assommé par les flashs. Tout le monde est choqué par ces images. On vote donc une loi qui interdit de montrer des personnes menottées. Ce qui fait qu'un journaliste qui filme Bertrand Cantat arrêté à Vilnius est obligé de lui "couper" les bras. Ce qui fait aussi que, si vous souhaitez avoir un débat sur l'usage des menottes, si vous voulez même dénoncer cet usage, vous n'avez pas le droit d'illustrer votre propos avec des images de la réalité.(...)Est-elle (NDLR : la France), dans ce domaine, le plus restrictif des pays européens ?
Oui, et de très loin.
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