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1 avril 2015

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Par Gérard Pommier, psychiatre, professeur de psychopathologie à l'université Paris VII, membre du collectif Anti D.S.M

Le mardi 24 mars, l'A320 des Germanwings s'écrasait dans les Alpes du sud. Selon les premières nouvelles il s'agissait d'un acte volontaire du copilote. La presse a annoncé assez vite ce qui pouvait en être les motifs. Sur les ordonnances, les papiers chiffonnés d'Andreas Lubitz, de même qu'à partir de ce qui a pu filtrer des dossiers, les journaux ont fait état d'une « dépression » et d'un « burn out ». Trouvera-t-on quelque part un diagnostic plus précis ?
C'est peu probable. Au cas où Lubitz aurait rencontré un psychiatre averti, formé à la psychiatrie classique, un psychiatre encore au moins capable de différencier la psychose de la névrose, ce dernier aurait été obligé d'écrire son diagnostic dans les termes dérivés du D.S.M. 5 de la psychiatrie américaine, qui sont des « non-diagnostics ». Le terme « dépression » veut dire « triste », et cette dépression peut-être aussi bien causée par un deuil normal, qu'être le symptôme d'un état grave. De même « burn-out » veut dire « fatigué », état qui peut recouvrir aussi bien un excès de travail qu'une fatigue psychique de cause indéterminée.
Or pour faire un diagnostic et un pronostic efficace il faut avoir une idée de la causalité un peu plus précise. Si Lubitz a rencontré un jeune psychiatre, uniquement formé selon les items du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (ou DSM), il aura soigneusement coché les 5 cases destinées au « non-diagnostic », et il n'aura pas vu autre chose qu'une « dépression » ou un « burn-out » c'est-à-dire rien de spécifique, ni d'alarmant. Il est vrai qu'aucun diagnostic ne permet de prévoir avec certitude l'avenir. Mais c'est encore pire lorsqu'il n'y a pas de diagnostic, dont les nouvelles classifications sont maintenant imposées au niveau mondial par l'OMS, qui recommande des classifications analogues au DSM de la psychiatrie américaine.
C'est pareil au niveau de la France avec la Haute Autorité de santé (HAS) et sûrement aussi en Allemagne. Le résultat est là : le diagnostic de Lubitz n'aura pas été fait, ou bien il n'aura pas été communiqué, sinon avec les termes obligatoires du DSM. En effet devant l'inanité des classifications que les praticiens sont obligés d'employer, ils préfèrent souvent utiliser les termes les plus vagues possibles dans leurs comptes rendus. Le diagnostic de dépression est un fourre tout.

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